Maître Alexandre GASPOZ, Avocat en droit des sociétés sur NICE et l’ensemble du territoire national, vous conseille et vous assiste en matière de droit des sociétés.
L’ordonnance du 12 mars 2025 a été prise en application de la loi n°2024-537 du 13 juin 2024 visant à accroitre le financement des entreprises et l’attractivité de la France.
L’article 26 de cette loi traduisait déjà une volonté de simplifier et de clarifier le régime des nullités en droit des sociétés. Il vise, en outre, à renforcer la sécurité juridique entourant la constitution des sociétés, leurs actes, leurs délibérations ainsi que les règles qui les régissent. Cette ordonnance rentrera en vigueur le 1er octobre 2025.
Le régime des nullités en droit des sociétés est particulièrement complexe en raison des enjeux importants qu’il soulève et des conséquences potentielles lourdes pour la société concernée. Ainsi, l’ordonnance repose sur un axe majeur de simplification et de renfort de la sécurité juridique. La prononciation de la nullité d’une décision au sein d’une société peut entrainer la nullité en cascade de l’ensemble des décisions découlant de la première. En effet, autrefois, une irrégularité, même mineure, pouvait automatiquement conduire à l’annulation d’une décision. Aujourd’hui, le régime des nullités tend à corriger ces irrégularités, en renforçant le contrôle du d’appréciation du juge.
Par conséquent, l’ordonnance accorde une attention particulière à l’encadrement des effets de la nullité, afin de prévenir et limiter ces nullités dites « en cascade », présentant des risques pour la stabilité juridique des sociétés. Désormais, un dispositif à portée générale est en place autorisant le juge à différer dans le temps les effets de la nullité s’ils s’avèrent manifestement excessifs pour l’intérêt social, d’après le nouvel article 1844-15-2 du Code civil.
Dans un objectif de simplification du régime des nullités, l’ordonnance instaure un « triple contrôle » par lequel le juge devra passer avant de prononcer une nullité. Ce contrôle se décline en trois étapes. D’abord, un contrôle du grief du demandeur, en effet l’irrégularité devant causer un préjudice au demandeur, pour pouvoir prononcer la nullité. Puis, une appréciation de l’influence de l’irrégularité sur le sens de la décision contestée. Enfin, un contrôle de proportionnalité afin d’apprécier l’équilibre entre les effets de l’irrégularité et ceux susceptibles de résulter de l’annulation de la décision.
Le rapport au Président de la République expose les différents objectifs poursuivis par l’ordonnance. Parmi eux, la sécurisation des décisions sociales et du cantonnement des nullités susceptibles de les affecter. C’est dans cette perspective que le « triple test » a été introduit, au sein du nouvel article 1844-12-1 du code civil, en vigueur à partir du 1er octobre 2025. Le but de ce test vise à éviter qu’une simple irrégularité puisse compromettre la validité d’une décision sociale, avec le risque de provoquer des nullités en cascade. Il reflète ainsi une nette volonté de renforcer le rôle du juge.
Également, le délai de droit commun de la prescription de l’action en nullité est réduit de trois à deux ans après réécriture de l’article 1844-14 du Code civil.
Un autre axe majeur de l’ordonnance concerne les causes de nullité du contrat de société. En effet l’article 1844-10 du Code civil limite la nullité de la société à l’incapacité de tous les fondateurs ou de la violation des dispositions fixant un nombre maximal de deux associés. Il en résulte la suppression d’autres causes traditionnelles de nullité, telles que l’absence d’un des éléments constitutifs du contrat de société.
Par ailleurs, un important travail a été effectué au sein du Code civil et du Code de commerce. En effet, plusieurs dispositions étaient dispersée au sein de ces codes, nuisant ainsi à leurs cohérence et lisibilité. Dès lors, le Code civil devient le texte de référence pour le régime général des nullités, et le Code de commerce ne conserve que les règles spécifiques aux opération particulières.
Dans ce sens, une clarification de certains termes a été estimée nécessaire, après plusieurs incertitudes exprimées par des praticiens quant à leur terminologie. Par conséquent, les termes « actes et délibérations » ont été remplacés par « décisions sociales ». Ce changement est important dans la mesure où il englobe les décisions internes de la société prises par l’assemblée ou le dirigeant par exemple. Cela exclut ainsi les contrats conclus avec les tiers ou les simples avis donnés par des instances collectives.
Par ailleurs, l’ordonnance clarifie également la question de la nullité pour violation des statuts. En effet, une incertitude planait concernant la possibilité d’annuler une décision prise en violation des statuts, et c’est principalement le juge qui en fixait les limites. Désormais, un principe général d’exclusion est posé, qui réserve la possibilité de dispositions dérogatoires. Autrement dit, une telle violation ne constitue plus automatiquement une cause de nullité d’une décision sociale.
Des praticiens ont sollicité la mise en place d’une exception concernant le cas spécifique des sociétés par action simplifiée. L’ordonnance permet désormais aux statuts d’une SAS de prévoir la nullité de certaines décisions sociales prises en violation des règles qu’ils ont établi. Autrement dit, les associés peuvent désigner expressément que certaines sont essentielles, dont le non-respect entrainera la nullité de la décision concernée.
Cette dérogation s’explique par la nature particulière de la SAS, caractérisée par sa grande souplesse dans l’organisation des pouvoirs, prises de décision ou des droits des associés. Il est ainsi nécessaire de renforcer certaines règles internes leur conférant une portée obligatoire.
C’est l’article L227-20-1 du Code de commerce qui encadre ce mécanisme offert aux associé. Toutefois, l’action en nullité intentée sur ce fondement relève des dispositions de droit commun des nullités telles que prévues par le Code civil.
L’ordonnance a ainsi pour effet d’unifier le régime des nullités en instaurant une règlementation claire au sein des articles 1844-10 et suivants du Code civil, devenant ainsi le droit commun, applicable à toutes les formes de sociétés. Toutefois, des dispositions spécifiques demeurent nécessaires pour certaines catégories de sociétés, et sont donc conservées au sein du Code de commerce.
Maître Alexandre GASPOZ, Avocat en droit des sociétés sur Nice et l’ensemble de la région PACA, vous conseille en matière de nullité en droit des sociétés.
Ord. n° 2025-229, 12 mars 2025, portant réforme du régime des nullités en droit des sociétés.