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Exception à l’interdiction des poursuites en cas de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire

par | Juil 8, 2024

Maître Alexandre GASPOZ, Avocat en procédures collectives à NICE, vous informe sur la nature de vos droits en cas de redressement judiciaire.

Une action tendant à l’annulation d’un contrat de vente intentée contre un débiteur placé en procédure collective peut dans certains cas échapper à la règle de l’interdiction des poursuites usuellement applicable ; telle est la solution dégagée par cet arrêt de Chambre commerciale du 12 juin 2024.

En droit, un débiteur in bonis, c’est-à-dire un débiteur en bonne santé financière ou qui n’est pas en état de cessation des paiements, peut être poursuivi individuellement par chacun des créanciers.

A contrario, un débiteur sous procédure collective ne peut être poursuivi individuellement par ses créanciers du fait du principe d’égalité des créanciers. En outre, ce débiteur se voit appliquer le principe de l’arrêt des poursuites individuelles. C’est-à-dire que dès l’ouverture de la procédure collective, les poursuites individuelles contre le débiteur sont arrêtées. Cela signifie que les créanciers ne peuvent plus engager de nouvelles actions en justice pour récupérer leur argent individuellement.

Concrètement, la norme juridique édictée par le Code de commerce pose le principe selon lequel, par les dispositions de l’article L.622-21 du Code de commerce, le jugement d’ouverture a pour effet d’interdire ou d’interrompre toute action en justice menée par tous les créanciers dont la créance ne serait mentionnée au I de l’article L.622-17. Plus précisément, il s’agit du jugement d’ouverture ayant pour visée la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent, ou la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent.

En l’espèce, un couple a fait l’acquisition en 2013 de panneaux photovoltaïques auprès d’une société. Le même jour, les acheteurs ont souscrit un crédit auprès d’un établissement bancaire destiné à l’achat de ces panneaux photovoltaïques.

L’année suivante, la société venderesse a été placée en liquidation judiciaire.

En 2015, le couple a finalement assigné à un jour d’intervalle la banque et la société. Plus précisément, ces demandes portaient à titre principal sur l’annulation des contrats de vente ainsi que du crédit affecté à cette opération ; et à titre subsidiaire sur la résolution desdits contrats.

En cause d’appel, la banque a contesté la décision de première instance qui avait été alors favorable au couple.

Les juges du fond ont estimé que les demandes des époux étaient a contrario irrecevables au titre de la règle de l’interdiction des poursuites, sur le fondement des dispositions de l’article L. 622-21 du Code de commerce. A cet égard, la cour d’appel a utilisé cet article en mettant en exergue le fait que les demandes à titre principal et subsidiaire énoncées par le vendeur « affecteront nécessairement le passif de la liquidation judiciaire » afin d’utiliser ces dispositions du législateur et affirmer l’applicabilité de la règle d’interdiction des poursuite

Ayant formé un pourvoi auprès de la Cour de cassation, les époux en tant que partie demanderesse sont venus rappeler la règle selon laquelle le jugement d’ouverture d’une procédure collective interdit toute action en justice de la part des créanciers tendant à la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent ou à la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent.

Par ailleurs, le couple a estimé que les actions en nullité d’un contrat ou en résolution pour inexécution d’une obligation de faire étaient, au contraire, autorisées malgré la survenance de la liquidation judiciaire du cocontractant.

En allant dans le sens des demandeurs, la Haute Juridiction vient énoncer sa solution au visa de l’article L.622-21 du Code de commerce. Cette disposition vient ainsi rappeler que le jugement d’ouverture a pour effet d’interrompre ou d’interdire toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n’est pas mentionnée au I de l’article L.622-17 du même code et tendant, d’une part, à la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent ; et d’autre part, à la résolution du contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent.

Consécutivement, les conseillers de la Cour de cassation en venant citer l’article L.622-21 du Code de commerce ont ainsi rappelé que les actions litigieuses ne sauraient en l’espèce relever de l’article précité.

En effet, la Chambre commerciale vient rappeler que les demandeurs au pourvoi ont formé leur demande d’annulation du contrat de vente sur le fondement de la violation des article L.111-1 et L.121-23 du Code de la consommation dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 14 mars 2016.

En outre, cela vient caractériser au regard de la Haute Juridiction le fait que les demandeurs ne sollicitent ici en l’espèce nullement la condamnation du défendeur au paiement d’une somme d’argent, et de la même manière aucunement le défaut de paiement d’une somme de cette nature, pas plus qu’ils ne réclament la restitution du prix de vente.

Par cet arrêt publié au Bulletin, la Cour de cassation casse ainsi l’arrêt d’appel, ayant estimé que les demandes litigieuses n’entraient pas dans le cadre de la règle de l’interdiction des poursuites relevée par les juges du fond de par leur utilisation de l’article L. 622-21 du Code de commerce.

Maître Alexandre GASPOZ, Avocat en matière de liquidation judiciaire à NICE, vous conseille et vous assiste en matière de procédures collectives.

(Cass. Com. 12 juin 2024, F-B, n° 19-14.480)

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