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Avocat au barreau de Nice

Maître Alexandre Gaspoz

Coronavirus : l’exercice du droit de retrait après les mesures de confinement

par | Avr 1, 2020

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Le régime juridique applicable du droit de retrait des salariés avec la pandémie de Covid-19

La pandémie de Covid-19 donne lieu à de nombreux droits d’alerte et de retrait.

Maître Alexandre GASPOZ, Avocat en Droit du travail à NICE, vous informe sur le droit de retrait des salariés durant la pandémie liée au Covid 19.

Dès lors que l’employeur a mis en œuvre les règles de sécurité prévues par le texte, le droit de retrait n’est pas justifié.

En cas de retrait d’un travailleur, il est nécessaire de lancer la procédure d’alerte.

La phrase est pourtant impropre car le droit de retrait est indissociable du droit d’alerte.

Le travailleur se retire valablement d’une situation de danger grave et imminent après en avoir alerté l’employeur.

Le CSE est alors réuni.

À défaut d’accord entre l’employeur et la représentation du personnel, l’inspection du travail puis le juge disent si le travailleur est fondé à mobiliser son droit d’alerte et de retrait.

Si l’employeur respecte l’ensemble des règles de sécurité, les autorités ne valideront vraisemblablement pas l’exercice du droit d’alerte et du droit de retrait.

Dès lors que l’employeur respecte les règles de sécurité, le danger grave et imminent attaché au travail n’est pas caractérisé.

L’employeur peut alors faire face à l’abus du droit d’alerte et de retrait.

► Règles de sécurité face à une pandémie

En présence d’une pandémie, l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé de son personnel (Circ. DGT n° 2009/16, 3 juill. 2009 relative à la pandémie grippale et complétant Circ. DGT n° 2007/18, 18 déc. 2007).

Mais de quelles mesures parle-t-on ? Une circulaire du 18 décembre 2007 fournit des premières indications.

En définitive, le dispositif retenu par l’employeur doit être présenté à la représentation du personnel et aux services de santé au travail.

Règles issues de la circulaire du 18 décembre 2007

La circulaire DGT 2007/18 du 18 décembre 2007 distingue quatre situations :

– les salariés travaillent à distance et ne sont donc pas exposés à des contacts humains variés et nombreux du fait de leur activité professionnelle.

Dans ce cas, l’employeur se réfère aux consignes des autorités sanitaires valables pour la population générale.

– les salariés sont présents sur leur lieu de travail habituel (hors domicile privé) et sont en conséquence exposés au risque environnemental général, notamment du fait du contact avec leurs collègues dans l’entreprise, sans que le risque soit aggravé par une organisation particulière du travail (situation la plus fréquente).

Les consignes élémentaires d’hygiène et de sécurité destinées à la population générale sont applicables à l’entreprise de manière renforcée, en fonction de l’évaluation des risques actualisée.

– pour les salariés exposés régulièrement à des contacts étroits avec le public du fait de leur profession, le risque de transmission du virus pandémique s’avère plus élevé.

Dans ce contexte particulier, il est vivement recommandé à l’employeur de mettre en place des mesures d’hygiène renforcées.

Outre un dispositif de protection approprié, « lorsque les contacts sont prolongés et proches, il y a lieu de compléter les mesures barrières par exemple par l’installation d’une zone de courtoisie d’un mètre, par le nettoyage des surfaces avec un produit approprié, ainsi que par le lavage des mains » (Min. trav., Questions/réponses Coronavirus, 19 mars 2020) ;

– pour les situations dans lesquelles les salariés sont directement exposés à un risque, encore aggravé, de transmission du virus pandémique en raison même de la nature de leur activité professionnelle habituelle (il peut s’agir par exemple du personnel des services de maladies infectieuses), la réglementation propre au risque biologique s’applique alors avec d’autant plus de vigilance.

Information de la représentation du personnel et conseils de professionnels de santé

L’évaluation du risque, comme la description des mesures prises doivent être mentionnés dans le document unique d’évaluation des risques (DUERP).

Ces mesures sont présentées au CSE.

Nous conseillons aux entreprises de contacter sans délai leur service de santé au travail.

Le médecin du travail peut conseiller l’employeur sur les différents types d’équipements individuels à prévoir : masques antiprojections, protections respiratoires individuelles (PRI), gants, lunettes, combinaisons (Circ. DGT 2007/18, 18 déc. 2007).

L’autorité scientifique du médecin du travail sera associée aux mesures prises.

À défaut de réponse, et c’est l’issue la plus probable, nous conseillons de lui adresser la description des mesures de sécurité mises en œuvre, et de solliciter son avis.

Enfin, les employeurs peuvent solliciter l’aval d’un expert médical pour fonder leur décision.

Il peut s’agir par exemple, d’un médecin expert près la cour d’appel.

L’employeur qui met ainsi en œuvre les prescriptions des autorités sanitaires répond aux impératifs de l’obligation de sécurité.

A cet égard, ne méconnaît pas l’obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, l’employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du Code du travail (Cass. soc., 25 nov. 2015, n° 14-24.444).

► Différence entre pandémie globale et danger grave et imminent lié au travail

Selon l’OMS, la situation du covid-19 est pandémique.

Une nouvelle maladie se diffuse sur toute la terre et une grande partie de la population n’y est pas immunisée.

Cette situation constitue-t-elle, au travail, un danger grave et imminent ?

Si l’employeur respecte les règles de sécurité citées ci-dessus, la réponse doit être négative.

Le droit d’alerte et de retrait vise un danger attaché spécifiquement au travail et non un risque global.

Au sujet de la pandémie grippale, la circulaire DGT 2009/16 du 3 juillet 2009 expose : « il convient de souligner que le droit de retrait vise une situation particulière de travail et non une situation générale de pandémie ».

L’exposition du travailleur à un danger grave et immédiat est imputée à l’employeur dans la mesure où elle résulte des conditions de travail.

Au sujet d’un chantier de terrassement de roches amiantifères, la chambre criminelle relève la défaillance des protections contre les poussières cancérigènes.

Elle conclut que les travaux entrepris sur le site entraînent un risque grave et immédiat de mort ou de blessures graves (Cass. crim., 19 avr. 2017, n° 16-80.695).

C’est donc la particularité du lieu de travail et l’inadéquation des protections fournies par l’employeur qui est à l’origine du risque reproché à ce dernier.

A contrario, l’employeur n’est pas responsable d’un risque qui n’est pas spécifique au travail, et pour lequel des mesures de sécurité appropriées ont été déployées.

► Gestion de l’abus de droit d’alerte et de retrait en cas de pandémie

Face à une pandémie, le salarié peut s’estimer fondé à exercer son droit de retrait.

Le cas échéant, en plus d’avoir adopté des mesures de sécurité adéquates, l’employeur peut tenir la conduite suivante : lancer la procédure d’alerte, gérer l’exercice du droit de retrait.

Maître Alexandre GASPOZ, Avocat en droit social à NICE, vous informe sur la gestion du droit d’alerte

Exercer son droit de retrait en présence d’un danger grave et imminent, c’est aussi alerter sur l’existence de ce danger.

En présence d’un droit de retrait, la procédure d’alerte doit être lancée.

Le Code du travail donne la marche à suivre.

Celle-ci ne peut être ignorée, au risque de commettre un délit d’entrave.

Par ailleurs, le bénéfice de la faute inexcusable est de droit si un sinistre professionnel survient après une telle alerte, sans réponse adéquate de l’employeur (C. trav., art. L. 4131-4).

L’employeur signale l’existence de l’alerte au représentant du personnel au CSE.

Ce dernier consigne son avis par écrit (C. trav., art. L. 4132-2) dans un registre d’alerte dédié (C. trav., art. D. 4132-1).

L’employeur procède immédiatement à une enquête avec le représentant du CSE qui lui a signalé le danger et prend les dispositions nécessaires pour y remédier.

Nous conseillons à l’employeur de formaliser brièvement par écrit la teneur de cette enquête et d’inviter le représentant du personnel à co-signer ce document.

En cas de divergence sur la réalité du danger ou la façon de le faire cesser, le CSE est réuni dans un délai n’excédant pas 24 heures.

L’employeur invite l’inspection du travail et la CARSAT à cette réunion (C. trav., art. L. 4132-3).

Il y convie également le médecin du travail.

Le CSE se prononce par un vote auquel l’employeur ne prend pas part.

À défaut d’accord, l’inspecteur du travail est saisi immédiatement par l’employeur (C. trav., art. L. 4132-4).

L’inspecteur du travail peut mettre en œuvre l’une des procédures de mise en demeure prévues par le Code du travail.

Il peut aussi saisir le juge en référé pour voir ordonnées toutes mesures propres à faire cesser le risque.

Le Code du travail organise ainsi une résolution rapide de l’alerte abusive.

Gestion du droit de retrait

L’exercice du droit de retrait dans le contexte du risque d’épidémie de coronavirus est-il légitime ?

Pour l’instant, les pouvoirs publics n’ont pas donné une doctrine qui les engage.

Les questions-réponses mis à jour le 19 mars 2020 indique : « dès lors que sont mises en œuvre, tant par l’employeur que par les salariés, les recommandations du gouvernement, la seule circonstance que je sois affecté(e) à l’accueil du public et pour des contacts prolongés et proches ne suffit pas sous réserve de l’appréciation souveraine des tribunaux, à considérer que je justifie d’un motif raisonnable pour exercer mon droit de retrait ».

La Direction générale du travail suit cette ligne – laisser au juge la responsabilité de statuer.

Au sujet du covid-19, « l’inspecteur du travail (IT) n’a pas à se prononcer sur la réalité du danger grave et imminent (DGI). Il appartient uniquement au juge de trancher ce point, s’il est saisi » (Inst. DGT n° 2020/ relative à la gestion de crise Covid-19, 13 mars 2020).

Ces textes gouvernementaux n’offrent pas beaucoup de sécurité juridique à l’employeur.

Le travail préalable de l’employeur, en lien avec les IRP et les professionnels de santé, donnera de la légitimité à son action.

En cas de conflit résultant du droit de retrait, l’employeur exposera à la juridiction les mesures de sécurité, leur présentation au CSE, à la médecine du travail et éventuellement à un expert médical.

Lorsque le droit de retrait individuel n’est pas fondé, le salarié s’expose à une retenue sur salaire (Cass. crim., 25 nov. 2008, n° 07-87.650).

Néanmoins, pour que cette retenue ne soit pas assimilée à une sanction pécuniaire illicite, l’absence de danger grave et imminent doit avoir été démontrée.

En l’absence du point de vue de l’inspection du travail ou de décision juridictionnelle au sujet d’un droit individuel de retrait, nous déconseillons aux employeurs d’effectuer une retenue sur salaire unilatérale.

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