Maître Alexandre GASPOZ, Avocat en droit social à NICE, vous informe et vous conseille en matière de contractualisation de primes.
Par un arrêt récent du 22 mai 2024, la Chambre sociale de la Cour de cassation est venue rappeler la possibilité de contractualisation de primes exceptionnelles à échéances régulières, bien que celles-ci ne soient pas prévues aux terme du contrat de travail conclu entre l’employeur et le salarié.
En l’espèce, un salarié a perçu entre 2012 et février 2016 une « prime exceptionnelle » mensuelle dont le montant variait entre 900 et 1.000 euros. A partir du mois de mars 2016, cette prime a diminué et a fini par atteindre 56 euros au cours de l’année 2018.
A la suite de la rupture du contrat de travail, le salarié est venu considérer que ladite prime mensuelle versée entre 2012 et février 2016 a pris un caractère contractuel du fait de son versement régulier. Ainsi, le salarié a estimé que cela ne rendait pas possible la baisse unilatérale de la prime opérée par l’employeur.
Auprès des juges du fond, le salarié est venu demander, entre autres, le paiement d’un rappel de prime dite exceptionnelle.
Débouté de ses demandes, il se pourvoit en cassation.
Devant les hauts magistrats, le demandeur fait grief à l’arrêt d’appel de le débouter de sa demande en venant arguer que le fait pour un employeur d’accorder au salarié un avantage salarial durant plusieurs années entraîne une contractualisation de cet élément de rémunération qui ne peut alors plus être unilatéralement remis en cause. En outre, il vient arguer le fait qu’il ne soit pas nécessaire pour le salarié de démontrer le caractère général, fixe et constant de l’avantage en cause.
Au visa des dispositions de l’article L.1221-1 du Code du Travail, la Haute Juridiction vient rappeler que le contrat de travail est en tant que contrat soumis aux règles de droit commun et qu’il peut être établi selon les formes que les parties décident d’adopter.
En cause d’appel, l’employeur était venu arguer qu’il résulte des écritures de la prime litigieuse qui n’est pas prévue au contrat de travail qu’elle ne répond pas aux critères de généralité de constance et de fixité ; son montant ayant en l’occurrence oscillé entre 900 et 1000 euros pour finir par atteindre 56 euros en 2018. Également, l’employeur a expliqué que ces variations résultent du chiffre d’affaires du magasin ainsi que des résultats du vendeur, desquels en résultent les modes de calcul pour la prime versée au cours de l’année 2018.
La juridiction du Quai de l’Horloge estime a contrario que le caractère de régularité dans le versement de la prime sur plusieurs années à concurrence d’une somme allant de 900 à 1.000 euros est attesté, ce qui est ainsi constitutif d’un élément de rémunération contractualisé.
En définitive, du fait du caractère contractualisé de la prime reconnu par la Cour de cassation, la prime a acquis un caractère contractuel, ce qui signifie notamment que comme tout élément résultant d’un contrat que son montant ne peut être réduit sous réserve de l’accord du salarié.
Par cet arrêt de cassation partielle, la chambre sociale est venue rappeler qu’une prime constante, bien que non inscrite dans les stipulations d’un contrat de travail ; peut sous réserve de généralité, de constance et de fixité acquérir un caractère contractuel et se voir ainsi appliquer les règles afférentes au droit commun des contrats.
En effet, une solution similaire a déjà été rendue par la Chambre sociale concernant des primes allouées sur plusieurs années (Cass. soc., 13 déc. 2023, n°21-25.501) et à propos d’une une prime sur chiffre d’affaires (Cass. soc. 3 avril 2001, n°99-40.247).
(Cass. Soc. 22 mai 2024, n°23-10.076)
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